Cette lettre ouverte a été publiée dans The Globe and Mail le 30 septembre 2016

par John Tory, maire de Toronto, et Don Iveson, maire d'Edmonton et président du Caucus des maires des grandes villes de la Fédération canadienne des municipalités.

Une grave crise du logement sévit au Canada. Dans bien des villes, le prix des maisons est devenu prohibitif. Un locataire sur cinq consacre plus de la moitié de son revenu aux frais de logement. Le taux d'occupation des refuges d'urgence tourne autour de 90 %. Actuellement, 1,5 million de Canadiens n'arrivent pas à trouver de logements sûrs et convenables qui correspondent à leurs moyens.

Les logements sont devenus moins abordables à tous les niveaux de revenus. Les conséquences se font sentir fortement sur la prospérité, la productivité et la renommée de notre pays en tant que terre d'égalité et d'inclusion.

Depuis des années, les villes mènent l'offensive sur le terrain pour maintenir les logements à un niveau abordable. De nombreuses villes ont investi massivement, sont devenues des fournisseurs de logements sociaux et offrent des incitatifs pour stimuler les logements abordables. C'est entendu que ces efforts vont se poursuivre, mais il s'agit d'un enjeu de portée nationale qu'il faut contrer par des mesures de portée nationale.

Le gouvernement fédéral a pris certaines mesures importantes dans son premier budget, en consacrant des fonds aux grosses réparations essentielles des logements sociaux à même son Fonds de l'infrastructure sociale de la phase 1. Il a aussi lancé des consultations afin de concevoir la stratégie nationale sur le logement attendue depuis longtemps.

Aujourd'hui, en compagnie de nos collègues les maires des grandes villes, nous avons rencontré les ministres responsables du logement du gouvernement fédéral et du gouvernement ontarien au Sommet de Toronto sur le logement.  Nous leur avons présenté sept principes pour nous attaquer à la crise du logement, qui décrivent l'envergure du partenariat que nous devons établir pour vraiment progresser dans la résorption de cette crise :

Renforcer le logement abordable pour l'avenir en établissant une réserve ciblée à même le programme fédéral pour les infrastructures sociales dans le budget de 2017

La première tâche consiste à protéger les 600 000 logements sociaux actuels - pour les gens qui y vivent, et qui sont parfois des personnes handicapées, des nouveaux arrivants ou des personnes âgées à faibles revenus. Ces logements sont soutenus par les ententes d'exploitation fédérales qui arrivent en fin de durée. Sans nouveaux investissements, d'année en année, des dizaines de milliers de ces familles pourraient perdre leur chez-soi.

Construire plus de logements sociaux et de logements abordables et en soutenir l'exploitation

L'expérience nous a enseigné que les nouveaux programmes de construction de logements abordables et de logements sociaux devront être conçus différemment. Ils devront être assez souples pour s'adapter aux réalités du terrain, exploiter les solutions locales, mettre à profit l'expertise des fournisseurs de logements sociaux et abordables actuels, tant du secteur privé que du secteur public, et utiliser les terrains fédéraux excédentaires. 


Mettre fin à l'itinérance

Nous avons accompli des progrès dans la prévention et la réduction de l'itinérance, mais il reste encore beaucoup à faire. Entre 2005 et 2014, le taux d'occupation moyen des refuges d'urgence au Canada a grimpé à plus de 90 %, une hausse de près de 10 %.

Étant donné les besoins considérables dans certaines villes, les maires du Canada demandent de doubler les investissements globaux dans la SPLI jusqu'en 2025, pour les porter à 350 millions de dollars par année. Les villes les plus durement frappées par l'itinérance devraient bénéficier de ces fonds supplémentaires.

Stimuler la construction et la croissance du secteur locatif

Il faut investir intelligemment afin de secouer la profonde léthargie du marché locatif  - et construire les logements dont ont besoin les familles de différents niveaux de revenus. Nos recommandations pour stimuler ce marché sont d'établir des crédits d'impôt pour préserver le parc de logements locatifs à bas loyers, et d'exempter de la TPS les coûts de développement des projets de logements locatifs ainsi que les initiatives d'efficacité énergétique qui permettent de réduire les frais énergétiques des locataires.

Innover pour des solutions durables

À l'aide des crédits affectés au Fonds pour l'innovation en matière de logement locatif abordable dans le budget 2016, le gouvernement devrait aider directement les villes aux prises avec les plus graves problèmes de logement (ce qui serait déterminé par le nombre de ménages en besoin impérieux de logement et les taux d'itinérance). Ces villes pourraient ainsi soutenir la mise à l'essai d'innovations locales en matière de logement axées sur les priorités et les besoins locaux.

Fonds distincts pour le logement à l'intention des Autochtones et des populations du Nord

Toronto compte à elle seule quelque 1 000 familles, couples et personnes autochtones en attente d'un logement abordable pour les Autochtones. À Edmonton, un pourcentage disproportionné de familles se disant membres de Premières Nations, Métis ou Inuits habitent des logements sociaux.  Un fonds distinct pour le logement autochtone  peut être créé à même la réserve que nous recommandons pour le logement. Ce fonds serait mis en œuvre séparément et de façon à confier le processus décisionnel au secteur du logement autochtone. Les maires des grandes villes du Canada comprennent également les besoins importants et particuliers de logement dans le Nord même s'il ne s'agit pas strictement d'un enjeu urbain, et considèrent qu'un fonds similaire devrait aussi être établi pour les populations nordiques.

Examen du mandat de la Société canadienne d'hypothèques et de logement

La Stratégie nationale sur le logement devrait établir une direction et un calendrier en vue d'un examen du mandat de la SCHL en ce qui concerne la politique de logement au sein du système fédéral. Cet examen devrait aussi porter sur le rôle qui devra être confié à d'autres ministères fédéraux pour atteindre les objectifs de cette nouvelle stratégie.

D'après nos modélisations les plus rigoureuses, les investissements requis pour donner un vrai coup de barre dans la présente crise du logement se chiffrent à 12,6 milliards de dollars. Cette somme devrait être prélevée sur les 20 milliards de dollars du Fonds de l'infrastructure social prévu pour 10 ans, et s'ajouter aux investissements actuels du gouvernement fédéral.

Ce sont d'énormes investissements, mais leur rendement sera encore plus grand.

Les logements sûrs et abordables sont essentiels pour soutenir les jeunes, les nouveaux arrivants et les familles autochtones - dont nombre font partie de la main-d'œuvre talentueuse dont ont besoin les employeurs pour préserver leur compétitivité.

Nous savons aussi que les investissements dans le logement réduisent les coûts des soins de santé et du système de justice - des coûts évitables et très lourds pour nos partenaires provinciaux. Les avantages socioéconomiques que nous tirerons de cette grande entreprise après des décennies de sous-investissements dans le logement viendront changer la donne. Ils transformeront notre pays et renforceront notre système de logement pour des générations.

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