Mike Savage, maire d’Halifax, et John Tory, maire de Toronto

À l’heure actuelle, deux sentiments communs unissent les citoyens du pays : une lassitude croissante à l’égard des effets de la pandémie et le désir de construire un monde meilleur pour l’après COVID-19.  

En tant que maires, nous partageons ces sentiments avec vous. Depuis le début de la pandémie, les municipalités ont soutenu à bout de bras les services de première ligne et aidé des millions de nos concitoyens à se faire vacciner contre la COVID-19. Nous voulons continuer de soutenir la population et stimuler une forte relance partout au pays. Nous y voyons de réelles possibilités d’améliorer la qualité de vie des gens et de faire des progrès sur nos principaux défis nationaux, de la crise du logement à la lutte contre les changements climatiques.

La semaine dernière, en compagnie de nos collègues du caucus des maires des grandes villes de la Fédération canadienne des municipalités, nous avons partagé ce message à nos partenaires fédéraux. Nous avons rencontré plusieurs ministres, dont la ministre des Finances Chrystia Freeland, afin de voir comment les gouvernements peuvent faire avancer les choses en profitant du prochain budget fédéral. Mais nous avons aussi été clairs : une crise financière qui prend naissance dans nos villes pourrait compromettre la relance.

Pourtant, elle pourrait être désamorcée dès maintenant si le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux prenaient des engagements fermes. Depuis des mois, nous leur demandons de le faire sans obtenir pour autant de résultat – et c’est pourquoi nous sonnons l’alarme aujourd’hui.

La pandémie a ravagé les finances municipales. Nos transports collectifs sont financés par les droits de passage, et l’achalandage a fondu à cause de la pandémie. Aujourd’hui, la situation s’améliore peu à peu, mais nous sommes encore très loin des taux d’avant-pandémie. TransLink, qui dessert l’agglomération de Vancouver, prévoit des pertes de revenus de 200 millions de dollars en 2022, tandis que la Toronto Transit Commission prévoit un déficit opérationnel de 561 millions de dollars cette année. Par-dessus le marché, les villes ne sont pas autorisées à adopter des budgets déficitaires pour couvrir les pertes. Nous avons déjà dû prendre des décisions difficiles, comme de réduire le niveau de certains services, mettre à pied des employés et hausser les taxes foncières. Nous avons maintenant épuisé les options pour équilibrer notre budget sans faire mal à la population, et les moyens qui restent sont inacceptables.

Nous devons continuer de protéger les usagers des transports collectifs. Des millions de nos concitoyens en ont besoin tous les jours pour aller au travail ou à l’école et accéder à des services essentiels. Nous ne pouvons pas envisager d’abandonner les travailleurs de première ligne et les communautés marginalisées, ni d’entasser les gens dans les autobus en pleine pandémie. Bien légitimement, les Canadiens s’attendent à ce que nous rétablissions pleinement les services de transport collectif dans leur ville à mesure qu’ils retournent à leur lieu de travail et se remettent à fréquenter les restaurants et les commerces.

Par ailleurs, il est important de maintenir les taxes foncières les plus abordables possibles à la veille d’une relance économique. Il nous faut également préserver les grands projets qui propulseront notre pays dans l’avenir. Nous ne devons pas retarder les projets qui visent à remplacer nos autobus diesel par des modèles électriques peu polluants. Ni renoncer à investir dans les infrastructures dont nous avons besoin depuis longtemps, et à créer les emplois que ce genre de projet peut garantir.

Tout le monde veut protéger les transports collectifs, maintenir un coût de la vie abordable et protéger les projets d’infrastructure. C’est pourquoi nos partenaires fédéraux et provinciaux nous ont fourni des fonds opérationnels d’urgence plus tôt durant la pandémie. Nous leur en sommes reconnaissants. Bien entendu, ce soutien n’avait pas été conçu pour durer jusqu’en 2022, mais la pandémie, elle, continue de s’étirer.

Lors de nos rencontres avec les ministres fédéraux, nous avons eu des échanges constructifs sur les moyens de dynamiser une solide relance économique. Nous avons exploré l’élargissement de l’Initiative pour la création rapide de logements afin d’éradiquer l’itinérance chronique. Nous avons aussi examiné comment la stimulation des innovations vertes locales, notamment l’amélioration écoénergétique des bâtiments et le captage des biogaz, aiderait à atteindre les cibles climatiques canadiennes de 2030.

Les villes ont très hâte de produire les résultats qu’attend la population : de bons emplois, de nouveaux logements abordables, des réductions d’émissions, et encore plus. Mais elles ne pourront pas se consacrer à relancer notre économie si elles nagent en pleine crise financière. Nous devons d’abord et avant tout régler cette crise. Et il faut la régler maintenant, parce que les budgets municipaux en sont rendus aux étapes finales.

En somme, il y a consensus sur le fait que tous les gouvernements doivent collaborer pour résoudre ce problème. Certaines provinces ont indiqué qu’elles iraient de l’avant – pourvu que le gouvernement fédéral en fasse autant. Ne laissons pas les questions de juridictions nuire à la relance que méritent les Canadiens. Faisons avancer les choses tous ensemble, et faisons-le dès maintenant.

John Tory est maire de Toronto. Mike Savage est maire d’Halifax et président du caucus des maires des grandes villes de la Fédération canadienne des municipalités. Ce caucus représente 22 des plus grandes villes canadiennes.

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